Les droits de douane américains : une chance pour les consommateurs français sur les vins et spiritueux

    Les droits de douanes américains et leurs multiples rebondissements font la une des journaux depuis une quinzaine de jour. Un des thèmes préférés par Donald Trump pour mettre la pression sur l'Europe est de taxer les vins et spiritueux. Mais quel serait réellement l'impact si cette mesure était prise ? Qui seraient les perdants ? Qui seraient les gagnants ? L'étude suivante concerne le champagne mais nous verrons que certaines conclusions peuvent concerner les vins de renom internationale tels que les Bordeaux ou les Bourgognes. 

Le prix du champagne : 

    En faisant le rapport entre le chiffre d'affaire annuel de la filière et le nombre de bouteilles vendues, nous pouvons en conclure l'évolution du prix moyen tout marché confondu. Le prix de la bouteille a augmenté de 41% en 10 ans soit deux fois plus vite que l'inflation alors que la production est restée stable. Le ratio des ventes en France s'est aussi inversé sur la dernière décennie (60% du marché en 2013 pour 40% en 2023) ; la raison majeure étant la non accessibilité du produit par les consommateurs locaux à cause de l'augmentation du tarif. Le marché français a été jugé moins prioritaire que les autres destinations pour son manque de rentabilité. Il est à noter que cet état de fait a touché toute la filière vins et spiritueux. Médocain, j'ai vu les châteaux snobés les clients hexagonaux au profit de leurs homologues étrangers. Certains ayant tout simplement arrêté de vendre en France !!!!



Les types d'exploitation et les stratégies.

    Il existe deux types de fournisseurs de champagne chacune ayant sa stratégie : les caves et les petits exploitants. 

  • Les caves sont des exploitants ayant une production significative. Elles peuvent commercialisées plusieurs marques (par exemple la cave la plus importante est LVMH). Leur production représente 70% du total. Leur chiffre d'affaire est égal à 80% du marché. Elles privilégient le marché international (75% de la production) et pratiquent des tarifications élevées. Les ventes reposent sur la renommée des marques. Le marketing est essentiel pour valoriser le produit entraînant des coûts supplémentaires.
  • Les petits exploitants ont une production plus artisanale.  Leur marché privilégié est la France (68% des ventes). Les prix sont plus abordables.






Les marchés.

    La France représente 43% du marché mondial en nombre de bouteilles expédiées mais seulement 34% en terme de chiffre d'affaires. Ensuite, apparaissent dans ce classement : 

  • Les Etats Unis : 13% du chiffre d'affaire mondial
  • La Russie : 11%
  • Le Japon : 7%
  • L'Allemagne : 4%


L'emprise de l'industrie du luxe sur le secteur.

    Le TOP 6 des caves en terme de chiffre d'affaires fournissent à elles seules 49% du chiffre d'affaire mondial et 55% des exportations. Ces entreprises sont des conglomérats de marques illustres. Elles opèrent comme des groupes internationaux : production de masse et automatisée, opérations marketing.... Le client est attiré par la marque plus que par la qualité du produit (sans remettre en cause celle-ci). Se fournir auprès de ces caves relèvent plus du statut social que de l'expertise oenologique. Les Américains, les Russes et les Asiatiques (et les parvenus français), néophytes en terme de champagne, ont tendance à acheter leur produit en fonction de la renommée et de l'image de marque. Ces caves vendent donc de plus en plus sur les marchés internationaux déséquilibrent le rapport entre l'offre et la demande (la production comme nous l'avons vu antérieurement étant stable). Par conséquent, les prix augmentent entraînant ainsi toute la filière. Le consommateur français moyen, voyant les tarifs s'envoler, renonce finalement à acheter le produit

    La santé financière de ces structures, hormis Mumm, est plus que florissante. Le résultat net est en moyenne de 24% du chiffre d'affaire et la marge opérationnelle de 40%. Les actionnaires sont plus à la fête que les consommateurs !



L'impact de la hausse des taxes douanières.

    Si Donald Trump met à l'oeuvre une augmentation des droits de douane, le marché américain devrait diminuer. Prenons comme hypothèses que cette restriction soit de 20%, il y aurait alors un surstock de 500 000 bouteilles environ, soit un chiffre d'affaire de 160 M€, deux stratégies peuvent être mises en place : 

  • Stocker le surplus de production et le mettre sur le marché ultérieurement quand la situation sera plus favorable.  Les prix resteraient stables. Par contre, les principales caves auraient une rentrée d'argent moindre donc les bénéfices diminueront (passant d'une marge après impôts de 24% à 21%). Les marchés n'appréciant pas les profit warnings, les actions se dévaloriseront (étape déjà anticipé). Ni les actionnaires, ni les consommateurs ne seraient gagnants.
  • Chercher de nouveaux marchés pour écouler le surplus. Les fournisseurs devront séduire de nouveaux acquéreurs dont les clients français en diminuant les prix. Ce qui entraînera une baisse générale (en particulier sur les champagne de marque vendu en supermarché 70% des achats se faisant par la grande distribution en France).  Dans ce cas, les actionnaires seraient perdants mais les consommateurs en profiteraient.
    Finalement, les grands perdants seront les caves internationales produisant du luxe. Le consommateur français peut y gagner en fonction de la stratégie des grands groupes. Il peut prendre sa revanche. Il a été snobé depuis l'ouverture de nouveaux marchés plus rentables. La hausse des prix des vins et spiritueux depuis 2000 a été vertigineuse voire honteuse. L'industrie viticole est devenue un véritable business (il suffit de voir les investissements étrangers). Le "gueux" n'a plus sa place dans de nombreuses régions : champagne, vins bordelais et bourguignon devenant inabordables. Il est ignoré voire méprisé tout comme il l'est par nos "pseudos intellectuels bourgeois bohème et l'intelligentia médiatique". Cette difficulté va peut être rappeler à quelques exploitants qu'un client est toujours un client et qu'il ne faut jamais s'en moquer. On ne sait jamais ce qui peut arriver !

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